www.leprogres.fr

Date

Retraites : une solution ? Le “mieux-travailler”

Les manifestations d’opposition à la réforme des retraites ont recommencé en France. Prévisibles mais pour le moment peu efficaces, elles nous font parfois oublier combien le sujet est complexe et nous empêchent de nous pencher sur une problématique plus profonde : le rapport de notre société au travail. 

Chacun en appelle à la responsabilité de l’autre. La CGT demande au gouvernement de tout bonnement arrêter cette réforme, actuellement étudiée par les sénateurs. Le gouvernement appelle, pour sa part, les manifestants à ne pas “mettre le pays à genoux en provoquant une catastrophe écologique, agricole, sanitaire, voire humaine…”. Rien que ça. Le jeu de “ qui-culpabilisera-le-plus-l’autre”, on a l’habitude : c’est le même depuis plusieurs années. Avec des résultats peu probants de part et d’autre. Les gouvernements successifs sont désormais bien plus prompts à agir face aux scandales tout en restant relativement indifférents face aux milliers et parfois millions de personnes défilant dans les rues. Emmanuel Macron avait pourtant été clair pendant sa campagne : il allait réformer le système des retraites coûte que coûte. Difficile aujourd’hui d’être surpris par la volonté et la démarche gouvernementale.

Tous veulent changer les retraites !

Pourtant, tout le monde veut une réforme des retraites. Les manifestants actuels sont tous d’accord. On travaille parfois déjà trop longtemps dans le système actuel et en plus, les plus petites retraites ne permettent pas aujourd’hui à leurs bénéficiaires de vivre dignement. Il faut donc, selon eux, changer le système actuel. De l’autre côté, la majorité gouvernementale et alliés, officieux comme officiels, jouent le même refrain mais dans une autre tonalité. Il faut réformer le système des retraites : mais en repoussant l’âge de la retraite de 62 à 64 ans si l’on souhaite bénéficier de la retraite à taux plein. Chaque camp prétend, évidemment, que sa solution est la seule pouvant sauver le régime des retraites. Et dénigre évidemment la proposition du camp opposé et évoque son danger et l’inconscience d’une telle proposition. Cependant, mon propos ici n’est pas de prendre parti pour l’une ou l’autre des postures. La réponse vient aussi, selon moi, de notre rapport au travail.


Le poids du mal-être professionnel

https://jacquelinearbogast.com

Une étude, sortie récemment, raconte en partie l’histoire. 14 % de la population active serait en détresse psychologique alors que 40 % se disent épuisés au travail. Cela représente en théorie plus de 14 millions de personnes aujourd’hui en difficulté dans leur travail. Qu’en est-il du management agressif et parfois oppressif de certains dirigeants ou managers ? Pouvons-nous oublier la pression permanente exercée dans certains milieux professionnels et qui exclut de facto toute vie à côté de son travail ? Comment ne pas être impatient d’aller à la retraite au plus vite ? Ou alors comment tomber dans un désarroi encore plus profond en réalisant qu’il y a 2 ans de plus à tirer ?
Il suffit de se poser la question : quelqu’un de malheureux et qui ne vit que pour son travail parvient-il à avoir une vie sociale ? Une vie de famille équilibrée ? Des hobbies ? Les débuts du télétravail en étaient la preuve vivante : beaucoup de patrons et de managers avaient du mal à concevoir faire confiance à leurs collaborateurs et les laisser travailler de chez eux. Les salariés aussi ne sont pas en reste : beaucoup ne réalisent pas la charge énorme que porte un manager ou, pire, un chef d’entreprise. Chacun se battant pour son bout de gras sur les retraites, nous nous retrouvons face à une contestation qui mets de côté l’un des problèmes de fond (le bien-être au travail). Beaucoup de mes amis ont abandonné leurs postes à cause d’une pression excessive sur leurs épaules. Comment dans ces moment discerner ? Est-ce moi qui me suis trompé de voie professionnelle ou est-ce l’entreprise où je suis qui me met en difficulté ?

Je suis persuadé que, comme moi, des personnes passionnées par leur emploi, se verraient bien travailler plus longtemps sans problèmes ou partir à la retraite au moment où ils le souhaitent. Comment profiter de sa retraite, épuisé et aigri par une trop longue carrière ? La difficulté réelle est de rester durablement serein dans son travail mais aussi de réfléchir à l’évolution de ses fonctions au sein de l’entreprise, en prenant en compte mon expérience, mes capacités physiques et intellectuelles mais aussi de mon âge grandissant. Chacun d’entre nous peut comprendre qu’être aide-soignant à 55 ans est pénible. Mais est-ce que former et accompagner de plus jeunes aides-soignants est plus simple après 25 ans de carrière ? J’ose croire que oui. Notre système de retraite repose sur un système de solidarité. Pourquoi notre système de travail ne prendrait pas le même chemin ? Cette proposition ne permettra pas de tout résoudre. Mais notre société pourrait bien compter des gens plus heureux et plus sereins. Ce serait une belle victoire et une belle avancée, pour tous. 

Plus
D'articles